Villa
O’Higgins est un minuscule village dans un cul de sac au Sud du Chili. C’est le dernier village relié par la Carretera Austral. La route s’arrête ici. Il n’est
possible de continuer que par bateau.
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Village de Villa O'Higgins |
Le
prochain bateau est dans deux jours. J’en profite pour me reposer un peu après
les 2 dernières semaines sur cette route magnifique. Petit à petit, tous les
cyclos que j’ai rencontrés sur la Carretera Austral arrivent. Mes amis Jerry,
Franz et Franck ainsi que le groupe de Tenerife : Jesus, Jorge et Rayones.
Ça fait plaisir de se retrouver et de partager nos impressions. Cependant une
chose nous inquiète et c’est le sujet de conversation principal : ce
fameux bateau qui traverse le Lago del Desierto, enfin plutôt qui ne le
traverse pas !
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Port de Bahamondez (Villa O’Higgins) - La Carretera Austral c’était génial, encore faut il sortir de là ! |
En
temps normal, pour continuer et passer en Argentine, ça se passe comme ça :
7 kilomètres jusqu’au port de
Bahamondez, 3 heures de bateau au départ
de Villa O’Higgins pour rejoindre Candelario Mancilla, puis un sentier de 22 kilomètres
accessible uniquement à pied ou à vélo jusqu’à la frontière Argentine, ensuite
un second bateau qui traverse le Lago del Desierto pour retrouver la
piste et faire les 37 kilomètres de ripio jusqu’à El Chalten, la première ville
coté Argentin.
Le
souci c’est que le bateau qui traverse le Lago Del Desierto n’est plus ou pas
encore en fonctionnement. J’ai entendu plusieurs versions : le service ne
commence que le 15 décembre, le bateau est en panne, la compagnie attend une autorisation,
etc… bref une chose est sure, il n’y a pas de bateau. Les cyclos que j’ai croisés
me l’ont confirmé. Pour traverser le lac, la seule solution est d’empreinter un
sentier de 12 kilomètres qui le contourne. Selon ce que j’ai entendu et lu, il
n’est déjà pas facile à pied, mais avec le vélo chargé c’est apparemment une
belle galère. Certains ont mis 3 jours pour faire ces 12 kilomètres. On a pas
vraiment le choix alors prend de la nourriture pour quelques jours et allons y...
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Le lac O’Higgins – en route pour Candelario Mancilla |
Ça
commence plutôt bien, il fait beau et la traversée du lac O’higgins avec ses
eaux turquoises est superbe. On débarque à Candelario Mancilla, et avec Jerry on entame les
22 kilomètres jusqu’au Lago Del Desierto qui marque la frontière avec l'Argentine.
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Candelario Mancilla qui n’est en fait qu’un embarcadère |
Coté
Chillien, c’est très pentu et rocailleux, comme prévu, on pousse le vélo mais
on arrive quand même à faire quelques parties en pédalant.
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Enfin, on pousse quand même pas mal... |
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Dernier regard sur le lac O'Higgins - Vue du poste frontière chilien |
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La frontière au milieu de nulle part |
Coté
Argentin, la piste devient un sentier étroit. Ça se complique un peu : les
sacoches raccrochent de tous les côtés, quelques ruisseaux à traverser. Mais on
savait à quoi s’attendre. On trouve même ça plutôt amusant. Alors on pousse, on
fait de la trottinette pour passer les parties les plus étroites et on joue à
l’équilibriste sur les troncs d’arbres pour passer les rivières.
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Des fois ça passe... |
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Des fois ça casse... |
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En fin de journée, on arrive au poste frontière argentin sur les rives du Lago Del Desierto avec une superbe vue sur le mont Fitz Roy, bivouac de rêve |
C’est
le lendemain que les choses sérieuses commencent : la traversée du Lago Del
Desierto par ce fameux sentier. On part tous ensemble, mais rapidement les
groupes se forment. Je fais équipe avec Jerry. Dès le début, c’est plutôt
sport ! Des dizaines de ruisseaux
et rivières à traverser, des troncs d’arbres qui bloquent le chemin, de la
caillasse, des zones marécageuses, des montées très pentues, des descentes
glissantes, bref de quoi s’amuser.
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On en bave et c'est que le début... |
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Plusieurs fois on s'est demandé ce qu'on faisait la |
On
comprend vite que c’est pas aujourd’hui qu’on va pédaler. Alors on démonte les pédales et réorganise un
peu la disposition des sacoches pour passer le bourbier. On affine nos
techniques selon le terrain : on pousse le vélo à deux, on démonte les
sacoches pour passer certaines zones en en faisant deux voyages, un qui lève le
tronc d’arbre l’autre qui passe les vélos, chaîne humaine pour passer les
sacoches, etc… Avec Jerry, on met 9 heures pour faire 12 kilomètres. 9 heures
de galère, à pousser, porter et patauger dans la boue.
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Jesus et jorges, l'équipe de Tenerife en renfort |
Arrivé
de l’autre côté du lac, encore un petit effort pour aider ceux sont encore sur
le sentier. Grâce à cette entraide, on y arrivera finalement tous dans la
journée. Bilan: quelques bleus, un dérailleur tordu et un compteur perdu (le 4ème !).
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Tous exténués, on bivouaque ensemble après la traversée du lac |
El
Chalten est un village récent,
uniquement touristique, un alignement d’hôtels, de restaurants, de
campings et d’agences louant du matériel de randonnée. C’est vrai que les
montagnes des alentours lui donne un caractère particulier, surtout le mont Fitz
Roy assez emblématique.
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Les altentours de El Chalten |
C’est
le paradis des randonneurs. Moi, la randonnée à pied, j’ai déjà assez donné la
veille, et le mont Fitz Roy je l’ai vu sous toutes ses facettes du Nord au Sud.
Du coup j’ai pas grand-chose à y faire. Je n’y reste que quelques heures le
temps d'y faire une petite balade, quelques courses et remettre le vélo en état après cette
traversée épique, puis je repars.
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Un dernier regard sur El Chalten et le Mont Fitz Roy |
Les
montagnes sont derrière moi et la pampa me tend les bras. J’ai le vent dans le
dos, la route est parfaitement asphaltée. C’est vraiment agréable après des
centaines de kilomètres de piste. Jerry tourne vers El Calafate, moi je
continue vers le Sud.
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Entre El Chalten et Puerto Natales - Pampa, pampa, pampa - l'hectare de terre n'est pas cher par ici... |
Ça
devient une habitude, surtout en Argentine, ma carte me joue encore des tours. Sur les 430 kilomètres entre El Chalten et Puerto Natales, aucun des 8
villages qui figurent sur ma carte n'existe en réalité.
J’ai toujours espoir qu’au prochain il y aura quelque chose, mais les 2 cyclistes que je croise me disent qu’il n’y a rien du tout! Juste une station essence qui vend
des biscuits et des boissons sucrées au croisement de Tapi Aike . Me voilà obligé de faire les fonds de sacoches, inventer des recettes bizarres et me rationner, pour tenir jusque là. Au
passage, je vous conseille d'essayer la polenta au nesquick au petit déj, c’est pas mal.
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Overdose de pépitos à la station service de Tapi Aike pour fêter le passage des 50000 kilomètres |
Ici
plus qu’ailleurs c’est le vent qui fait la loi. Le pauvre petit cycliste (même
chargé) que je suis ne fait pas le poids. En allant vers le sud, je suis sensé
l’avoir dans le dos. Mais en pratique, c’est pas toujours vrai. Il souffle très
fort et en permanence vers l’Est avec des rafales à plus de 100km/h. J’ai
l’occasion de tester tous les côtés et je m’adapte comme je peux. De côté, je
roule penché et je fais des écarts énormes à chaque rafale ; de dos, je
survole la route et j'aligne les kilomètres sans éfforts ; de face, j’avance péniblement comme un escargot et j’ai
les oreilles qui sifflent. En une journée, je peux faire plus de 150 kilomètres
sans trop appuyer sur les pédales ou en faire 35 et terminer épuisé.
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Pampa, Pampa, Pampa... y a pas grand monde par ici... |
Une fois la journée terminée, la bataille avec le vent n'est pas terminé, il faut encore trouver un endroit de bivouac bien protégé. Pas toujours facile dans ces grands espaces ouverts. Alors tout y passe, les rares bâtiments abandonnés en bord de route, un trou dans la pampa ou les quelques arrêts de bus... Les petits tunnels qui passent sous la route sont devenus mes cachettes favorites pour dormir, mais aussi pour la pause casse-croûte.
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Entre El Chalten et Puerto Natales - bivouac bien protégé du vent derrière la colline |
Plus je vais vers le sud, plus les journées sont longues. Le soleil se couche vers 23 heures pour se lever vers 4 heures du matin, et même la nuit il fait encore suffisamment clair pour lire un livre. Du coup, je profite parfois de quelques rares accalmies de vent pour reprendre la route, même en pleine nuit. La sensation de liberté est immense.
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Vous comprenez pourquoi je roule parfois la nuit? |
Ces paysages infinis me plaisent mais il ne s'y passe pas grand chose. Les journées se résument uniquement à du vélo, rouler pour avancer. J’occupe mon esprit en
regardant détaler les quelques habitants des lieux sur mon passage : des
vicunas (lamas sauvages), des lièvres quelques autruches et des troupeaux de
moutons.
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Ils sont partout! |
J’enchaîne
les jours de pampa. Les paysages se suivent et se ressemblent. Je commence à apercevoir le
détroit de Magellan qui sépare la grande île de "Tierra Del Fuego" du Continent. C'est à Puntas Arenas que je prends le bateau pour le traverser.
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Punta Arenas - de l'autre coté du détroit de Magellan, la grande île de Tierra del Fuego |
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Débarquement sur Tierra del Fuego au village de El Porvenir |
L'Île de Tierra Del Fuego, c'est la dernière ligne droite avant Ushuaia. Je dois attendre encore un peu avant de voir les paysages que j'imagine. Le Nord de l'île est très sauvage avec encore beaucoup de pampa. Des oiseaux par centaines et beaucoup de Vicunas qui semblent moins timides que sur le continent.
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Tierra del Fuego - détroit de Magellan - Visite de Vicunias curieux au réveil dans la cabane de Pêcheur où j'ai passé la nuit |
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Tierra Del Fuego - encore de la pampa... |
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Tierra Del Fuego - Les pingouins rois de Onaisin |
Ce n'est que sur les derniers kilomètres au Sud de l'île que je retrouve les grandes forêts, les lacs et les sommets enneigés. Il y a même un petit col pour arriver à Ushuaia. C'est la dernière fois que je traverse les Andes.
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Tierra Del Fuego - Le Lac Fagnano |
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Tierra Del Fuego - les alentours de Ushuaia |
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Arrivée à Ushuaia - La fin du monde paraît-il! |
Joyeux Noël et Bonne Année à tous.
A bientôt
Hé hé, ça sent la fin de ton périple en Amérique du Sud !!!! ça c'est du sport !!!! Bravo, bonne continuation et à l'année prochaine sous d'autres cieux !!!!
RépondreSupprimerJoyeuses fêtes à toi, ou que tu sois...
De belles images plein Sud !! Encore génial ce billet. Et surtout bonne Fêtes de Noël et de fin d'année, un bon passage en 2014, meilleurs voeux pour cette nouvelle année qui devrait voir ton retour en Lorraine, enfin ??????? Seul Loïc le sait !! Et puisque tu es à Ushuaia, passe le bonjour à Nicolas Hulot.
RépondreSupprimerOn en apprend tous les jours à travers ton périple, photos et commentaires vraiment magnifique , on imagine la galère à travers les chemins de traverse mais bon tu es rôdé maintenant . On attend la suite avec impatience en attendant nous te souhaitons un joyeux noël même loin de nous tu es tout près. Une année 2014 avec tout ce que tu peux désirer. Allez bonne route hasta luego e buon viaggio
RépondreSupprimerBises des Parents
Bonjour!
RépondreSupprimerJe vous suis depuis un moment (fin 2011),mais de manière très irrégulière!
Un grand bravo à vous pour cette traversée incroyable de l'Amerique du Nord au Sud! Les photos et les recits sont excellents, ni trop longs ni trop courts, on voyage avec vous en vous lisant!!
Et pour les personnes qui, comme moi, prévoient de partir (début 2015), les détails que vous donnez aident pas mal à planifier au mieux son voyage.
Encore merci de me faire rêver!!Et bon courage pour la dernière partie du voyage!!
Joyeuses fêtes,
Rachid
Loic, merci pour cette année 2013 pendant laquelle tu nous as fait partager ton extraordinaire aventure. Je te souhaite un très joyeux Noël et une excellente nouvelle année. François
SupprimerBonnes fetes à toi aussi!
RépondreSupprimerC'est du sport dans ce secteur !
RépondreSupprimerBonnes fêtes de fin d'année à toi !
Je prépare un périple dans ce coin. Un très grand merci et un très grand bravo, c'est superbe ! je suis presque déjà fatigué avant d'être parti !
RépondreSupprimerC'est super! Extraordinaire! Bravo l'artiste, le formidable sportif !
RépondreSupprimerNous te souhaitons une excellente année 2014 aussi époustouflante que 2013, pleine de rencontres enrichissantes,de traversées de paysages sublimes. Bonne route!
Dom et Renaud
Je suis tombé par hasard sur votre blog et je viens de passer deux bonnes heures à lire et admirer vos photos de votre carnet de route en Amérique de Nord et du Sud. Bravo et un grand merci pour ce grand moment d'évasion. Bonne continuation, Christian
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