Le
très bon accueil reçu par Eugenie et sa famille m’a fait rester plus longtemps
que prévu à Salta (tout au Nord de l’Argentine). Mes amis Kurt, Lukas et Niguel
ont déjà repris la route depuis plusieurs jours. Il est temps pour moi de m’y
remettre aussi. C’est donc seul que je remonte sur mon vélo direction plein sud.
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Les alentours de Salta - C'est parti pour 1300 kilomètres jusque Mendoza |
Je
sors de la banlieue de Salta et traverse de grandes zones agricoles, mais
rapidement j’entre dans un canyon, les montagnes prennent des couleurs, les
rochers ont des formes curieuses et tout ça change à chaque virage. Les sites
géologiques se succèdent sur près d’une centaine de kilomètres, superbe!
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La quebrada de Cafayate |
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La quebrada de Cafayate |
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La quebrada de Cafayate |
Ces
falaises multicolores me mènent à Cafayate. Ce charmant petit village est
entouré par des vignes qui produisent des vins parmi les plus prestigieux
d’Argentine.
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Les alentours de Cafayate |
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Cafayate |
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Cafayate |
Bon moi, le vin, j’en bois pas…ce qui m’intéresse
à Cafayate c’est que c'est l'endroit où je bifurque sur la fameuse route 40.
Cette axe traverse l’Argentine du Nord (frontrière Bolivienne) au Sud (Ushuaïa, le bout du bout) en longeant la cordillère des
Andes sur plus de 5100 kilomètres.
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Ruta 40 - Je sourris parce que je ne sais pas encore ce qui m'attends... |
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Des cactus dans les vignes! C'est sûr, on est pas Bourgogne |
Je regarde la carte, en effet, cette
route longe et passe entre les contreforts de la cordillère. La grande majorité
des cyclo-voyageurs passent par là et avec ce que je viens de voir ces derniers
kilomètres, je m’y engage les yeux grands ouverts et j'en attends beaucoup.
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Ruta 40 - c'est tout droit... |
Et là, c’est plutôt une déception, les couleurs ont laissé place à des paysages désertiques. Même si certains passages sont sympas, c’est de longues lignes droites, plates et bien monotones que j’ai devant moi.
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Ruta 40 - Au programme du jour : vélo d'appartement |
J’ai bon espoir que ça devienne plus joli par la suite alors je roule, je persévère, je baisse la tête pour pédaler contre le vent, bref, j’aligne les kilomètres, tout droit entre la ligne à haute tension et la voie ferrée. Il n’y a d’ailleurs pas grand-chose d’autre à faire sur cette section dépeuplée. Je ne traverse qu’un ou deux villages par jour, ces quelques mots échangés avec les locaux sont souvent la seule distraction de la journée.
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Village de Londres - comme partout en Argentine, tout est "endormi" entre 13h et 17h |
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Entre Salta et Mendoza |
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Les empanadas |
Plus j’avance, plus les distances
entre les villages s’allongent et plus c’est désertique. Le vent a décidé de
m’en mettre plein la figure pour me faire profiter
pleinement de ces longues lignes droites et tester mon moral. A ce petit jeu, c’est souvent lui qui
gagne, quand je vois que mon compteur affiche moins de 10 km/h (sur le
plat !) j’abandonne et je m’enfonce dans le désert pour bivouaquer. Peu
importe qu’il soit 14h, 16h ou 18h. C’est bien là un avantage du désert: pouvoir
s’arrêter quand on veut pour mettre sa tente où on veut.
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Fin de journée |
Les
journées s’enchaînent et se ressemblent. Je me lève avec le soleil, je répare
les crevaisons du jour (y a pas que des avantages aux bivouacs dans le désert). Je rejoins la route, monte sur le vélo et mets le mode « pilote
automatique », les jambes tournent sans même m’en rendre compte. Une fois
n’est pas coutume, je me sers de mon lecteur MP3 pour écouter de la musique en
roulant, d’habitude je ne m’en sers que le soir pour les leçons d’espagnol.
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Ruta 40 - aujourd'hui aussi c'est tout droit... |
J’essaie
de trouver une alternative. Sur ma carte, les sections rectilignes qui
passent par le centre du pays n’annoncent pas mieux, et le prochain col pour
rejoindre le Chili (Agua negra) n’ouvre pas avant Novembre… je continue donc sur la
40…
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Village de San Blas |
J’arrive
au seul "petit" col de cette section de la route 40. C’est loin des grands cols
traversant toute la cordillère ou je suis passé ces derniers mois. mais j’apprécie de retrouver la montagne et ses superbes paysages ! Des couleurs, des virages, des cactus, de l’eau,
de la vie quoi !
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Col de Cuesta Miranda |
Un
matin, c’est Gérard qui vient me taper sur l’épaule. Il est Français, marié à
une argentine et s’est installé à Cordoba comme professeur de ski nautique, une
de ses passions. Pendant les quelques
kilomètres roulés ensemble, il
m’explique le défi qu’il s’est lancé à 45 ans : parcourir les 5100 kilomètres
de la route 40 du Nord au Sud, tout ça en moins de 40 jours ! Des grosses
journées de vélo en perspective. Ce sera le premier à le faire en vélo de
route. Bonne chance Gérard pour ce record !
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Gerard et son épouse Gabriela qui assure l'intendance - Suivez son record sur son site ou sur facebook |
Je
laisse partir Gérard et continue tranquillement à mon rythme, le vent semble me
laisser un peu de répit et jour après jour j’approche de Mendoza.
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Ruta 40 - Et entre ça y a rien? |
Dans ces zones désertiques, je
me fais peur avec l’eau une fois. Encore la faute à ma carte... et aux
panneaux de signalisation aussi…qui m’indiquent des villages là ou il n’y a
rien. En général, par soucis de poids (heu...par fainéantise) ,
j’essaie de transporter juste la quantité d’eau dont j’ai besoin jusqu’au prochain village, avec une
marge de « sécurité », sur la
route 40, ça tourne souvent autour des 8 litres.
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Ruta 40 - le "village" de Tucunuco - Bon ben, c'est pas ici que je vais remplir mes gourdes... |
Mais
quand ces villages fantômes se succèdent, je me retrouve à rouler en réserve et
tombe en panne sèche au milieu de nulle part et en fin de journée (c’est
mieux !) Le
prochain village où je suis sûr de trouver de l'eau est bien trop loin pour l’atteindre aujourd’hui. Me voilà résigner à arrêter les voitures pour demander de l’eau.
La circulation est faible et la moisson est bien maigre : une demi
bouteille d’eau, un peu de coca, pas de quoi passer la nuit ni d’allez jusqu’au
prochain village. J’abandonne vite la collecte pour passer au plan B : ces
petits « sanctuaires » de fortune que je vois un peu partout en bord
de route. Je pensais que c’était des sépultures, mais je me rends compte que les
trois même noms revenaient souvent : San Expedito, Gauchito gil et Difuenta
corea. Il y en a un tout les 20 kilomètres au moins et ils sont couverts de bouteilles
d’eau (pleines !)
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Un des ces sanctuaires |
Je
roule jusqu’au prochain, et, sans trop
savoir ce que cela signifie, je prends deux bouteilles d’eau, de quoi rouler
jusqu’au prochain village. Le lendemain , j’arrive à Talacasto, une maison en
tout et pour tout ! Le propriétaire m’en dit un peu plus sur ces « sanctuaires ».
A la ville de San Juan, je demande aussi à plusieurs personnes. J’entends
autant de versions différentes que de personnes auxquelles je demande… Il s’agit
de légendes, difuenta correa serait l’histoire d’une
jeune femme qui se serait échappée et serait morte de soif dans ces zones
désertiques, gauchito gil aurait été pendu après avoir déserté de la guerre
contre le Paraguay au 19ème siècle. Les routiers font des offrandes
(eau, cigarettes, objet divers) pour leur rendre hommage.
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Un autre... |
Les
derniers kilomètres entre San Juan et Mendoza sont plus stressants. Cette fois
la circulation est assez dense et les camions m’obligent souvent à sortir de la
route. Ici aussi les chauffeurs routiers préfèrent appuyer sur le klaxon pour
me dire de laisser la voie libre plutôt que de freiner. Je
passe les vignes qui entourent Mendoza et arrive au centre ville.
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La rue Serpenoise à Metz....heu non la rue Sarmiento à Mendoza... |
Salta m’avait séduit par son coté typique et son architecture coloniale, Mendoza me plait beaucoup aussi dans un registre tout à fait différent. La ville située au pied de volcans qui culminent à plus de 6000 mètres a été sujette à un gros tremblement de terre en 1861. La ville a été reconstruite avec de larges avenues arborés, des espaces verts, des esplanades, des parcs et jardins et ressemble beaucoup à une ville française. Elle semble vraiment agréable à vivre. J'y prends quelques jours de repos et je retrouve Jaqueline et Kayla.
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Repas chez la famille qui accueille Jacqueline et Kayla - Gracias a todos |
A bientôt.
La route 40 est une route mythique pour les Argentins mais quel ennui !! Au moins je sais qu'il vaut mieux éviter cette portion.
RépondreSupprimerBonne route et bon vent (de dos bien sûr) Loïc !!
Toujours aussi intéressant et instructif, originale cette grande ligne droite, on pourrait se croire sur ces fameuses grandes routes des States. Si tu peux ramener quelques "empanadas" en Lorraine, ça me tente bien. Tes parents arrivent sur ta route et ces retrouvailles font certainement vous faire du bien. On vous souhaite de partager quelques bons moments avant que tu descendes encore plus au Sud. Amitiés
RépondreSupprimerHola Loic,
RépondreSupprimerJe prends enfin le temps de lire tout ton blog.... un régal !
Que te vaya bien !
Enzo (cyclocosmos)