dimanche 27 octobre 2013

De Mendoza (Argentine) à Concepcion (Chili)

Après quelques jours de repos à Mendoza, je remonte sur le vélo. Le rendez-vous est pris avec mes parents qui me rejoignent à Santiago dans quelques jours. Quand on regarde sur la carte, ça parait tout près, mais pour y arriver, je dois à nouveau traverser la cordillère des Andes. Je passe les quelques zones industrielles de la périphérie de Mendoza et quitte la route 40 pour la route 7 avec en ligne de mire les sommets enneigés.

 En route pour Santiago…
Pas moins de 160 kilomètres de montée pour se hisser en haut du col à 3200 mètres d’altitude. Encore une fois, le vent ne facilite pas la tâche, mais malgré ça, c’est un plaisir de retrouver les montagnes.

Lac de Catcheuta 
Je monte tranquillement le long du Rio Mendoza et profite des paysages d’altitude. D’autant plus que ce col passe entre deux pics qui culminent à plus de 6000 mètres dont le plus haut sommet du continent Américain (le mont Aconcagua, 6960 mètres d’altitude). Je traverse quelques villages touristiques qui proposent des activités de plein air (rafting, balades à cheval, à pied, à vélo…)  puis arrive vers les sommets enneigés et les stations de ski.

Le sommet approche… 
Dernier bivouac avant le col
 Rencontre avec Dorothee, une cyclo allemande sur les routes depuis 2008
Au sommet, surprise ! Je revois mes amies Jaqueline et Kayla, que j’avais vu sur la route il y a une dizaine de jours et revu à Mendoza. Elles ont pris le bus pour éviter la circulation. C’est vrai que sur cet axe principal les bus et camions sont nombreux et parfois dangereux. C’est avec elles que je passe à nouveau la frontière chilienne.

Le sommet (3200 mètres d’altitude) qui marque la frontière avec le Chili - avec Jacqueline et Kayla
On se laisse descendre sur les centaines de virages qui nous mènent coté chilien. Jacqueline et Kalya continuent vers la côte, moi je bifurque vers la capitale. Je n’avais fait qu’un bref passage dans le Nord du Chili, cette deuxième entrée est pour moi l’occasion de découvrir vraiment ce pays.

De la circulation…ouais bon, y avait quelques camions quoi...
Descente coté chilien - Au revoir la neige…
Les premières empanadas chiliennes (2 fois plus grandes qu’en Argentine!  Qu'est ce que t'en penses Patrice?
Et ce pays,  je ne tarde pas à le découvrir. Alors que je passe à proximité du village de Quilapilun, mon attention est attirée par la voie du commentateur. C’est dimanche et c’est jour de rodéo. Je m’y arrête quelques heures assister au spectacle.

Les "huasos" (cavaliers) qui se préparent
Chaque équipe est composée de deux cavaliers. Le but est de contrôler la vache, pour ensuite lui faire faire un aller-retour sur la piste. Les concurrents sont notés par un jury selon leur aisance à contrôler l’animal.

Quand je dis "contrôle de l'animal", c'est plutôt violent

Le rodéo, une tradition chilienne 
Je continue mon chemin vers Santiago, je retrouve des paysages plus verts, des vignes, des collines, des forêts, des fleurs, des couleurs. C’est bien différent des paysages désertiques que j’ai vu ces dernières semaines en Argentine de l’autre côté de la cordillère.

Aux alentours de Santiago
A Santiago, je retrouve mes parents avec qui je passe une petite semaine. Je laisse le vélo tranquille le temps de visiter cette capitale moderne et plutôt sympa.

Santiago - Plaza de armas

Le centre ville de Santiago
On passe aussi quelques jours à Valparaiso sur la côte pacifique. Cette ville à flancs de collines très colorée a beaucoup de charme. Toutes les façades sont peintes de couleurs différentes, les fresques et graffitis ornent les murs des allées et la vue sur l’océan est imprenable.
  
Valparaiso avec mes parents
Un des ascenseurs de Valparaiso 
Valparaiso

Valparaiso ou Valpo comme l'appelle les chiliens est la 2ème plus grande ville du pays. Plus typique et moins aseptisée que Santiago, c'est agréable de se balader dans ces ruelles.

Le marché central de Valparaiso
Valparaiso
Valparaiso
Je reprends la route vers le Sud, ou plutôt l’autoroute. Rouler sur l’autoroute ne me plais pas particulièrement, mais la pluie, que je n’avais plus vu depuis des mois refait son apparition. Du coup, j’abandonne l’itinéraire que j’avais prévu par les pistes de la côte pacifique. Je préfère éviter de patauger dans la gadoue, la tête dans la capuche pour profiter du « confort » de l’autoroute.

Le "Chorrillana" une spécialité chilienne spéciale grosse faim
Je passe trois jours sur l’autoroute entre les vignes et les zones industrielles. Rien de bien intéressant, je roule pour avancer,  il pleut par intermittence, mais je peux profiter des  services offerts par les stations essence chiliennes : les aires de pique-nique,  toute la gamme des snacks, boissons et sandwichs, le wifi gratuit, etc…

Les vignes de la vallée centrale

Les autoroutes chiliennes ressemblent comme deux gouttes d’eau aux autoroutes françaises. Mais même si les panneaux « interdit aux vélos » sont bien présents, en pratique, ça fonctionne tout autrement. Je suis amusé et étonné d’y voir tout ce qui se passe. La police me salue aux gares de péage. On m’appelle un véhicule pour me faire traverser les tunnels. Les chemins de campagne ou chemins privés donnent directement sur les voies. J’y vois des marchands de fruits et légumes. Il y a des arrêts de bus sur le bas-côté et les passagers qui descendent des bus semblent habitués à traverser les 2 x 3 voies de l’autoroute en sautant la glissière de sécurité. Aussi je partage la bande d’arrêt d’urgence avec d’autres cyclistes, des gens qui font leur jogging ou encore qui promènent leur chien.

L'autoroute 5 aux alentours de San Javier - les ouvriers qui rentrent du boulot

Quand je sors de l’autoroute, mes oreilles me remercient. C’est un plaisir de retrouver le calme des routes de campagne. Les gens sont plutôt sympas et j'ai la chance de rencontrer David dans la petite ville de San Javier. On discute un peu, c'est la fin de journée, spontanément il m’héberge pour la nuit. Il vit dans une grande maison de  maître centenaire sur une propriété viticole qui appartient ses grands-parents. Il me parle beaucoup du tremblement de terre qui a touché le centre du Chili en 2010. Cette magnifique maison, comme beaucoup d'autres dans la région, a beaucoup souffert du séisme. Certaines ailes de la maison se sont littéralement écroulées.

Les murs fissurés d'une des parties de la maison qui a le moins souffert.
La campagne chilienne

L'église de Cauquenes

La côte est toute proche, le soleil est de retour. Pour quelques dizaines de kilomètres supplémentaires, je ne résiste pas à l'envie d'y faire une petite boucle. 

Après les grandes forêts de pins... l'océan pacifique
Village de Cobquecura
La pointe de Buchupureo
Je joue au yoyo entre les "playas" et les "puntas" dans des paysages côtiers très sauvages. C'est plutôt paisible, et la circulation se résume à quelques camions qui transportent du bois dans les usines de cellulose. La vie dans les villages ou plutôt les hameaux semble tourner au ralenti. Ici aussi je peux encore voir les dégâts causés par le tremblement de terre de 2010.


La petite ville de Quirihue
Je suis depuis deux jours à Concepcion, sur la côte chilienne,  hébergé chez Sylvain et Luz, un couple franco-chilien vraiment sympathique. J'en parlerais la prochaine fois.
A bientôt.

mercredi 9 octobre 2013

De Salta (Argentine) à Mendoza (Argentine)

Le très bon accueil reçu par Eugenie et sa famille m’a fait rester plus longtemps que prévu à Salta (tout au Nord de l’Argentine). Mes amis Kurt, Lukas et Niguel ont déjà repris la route depuis plusieurs jours. Il est temps pour moi de m’y remettre aussi. C’est donc seul que je remonte sur mon vélo direction plein sud.

Les alentours de Salta - C'est parti pour 1300 kilomètres jusque Mendoza
Je sors de la banlieue de Salta et traverse de grandes zones agricoles, mais rapidement j’entre dans un canyon, les montagnes prennent des couleurs, les rochers ont des formes curieuses et tout ça change à chaque virage. Les sites géologiques se succèdent sur près d’une centaine de kilomètres, superbe!

La quebrada de Cafayate

La quebrada de Cafayate

La quebrada de Cafayate
Ces falaises multicolores me mènent à Cafayate. Ce charmant petit village est entouré par des vignes qui produisent des vins parmi les plus prestigieux d’Argentine.

Les alentours de Cafayate

Cafayate

Cafayate
Bon moi, le vin, j’en bois pas…ce qui m’intéresse à Cafayate c’est que c'est l'endroit où je bifurque sur la fameuse route 40. Cette axe traverse l’Argentine du Nord (frontrière Bolivienne) au Sud (Ushuaïa, le bout du bout) en longeant la cordillère des Andes sur plus de 5100 kilomètres.

Ruta 40 - Je sourris parce que je ne sais pas encore ce qui m'attends...

Des cactus dans les vignes! C'est sûr, on est pas Bourgogne
Je regarde la carte, en effet, cette route longe et passe entre les contreforts de la cordillère. La grande majorité des cyclo-voyageurs passent par là et avec ce que je viens de voir ces derniers kilomètres, je m’y engage les yeux grands ouverts et j'en attends beaucoup. 

Ruta 40 -  c'est tout droit...
Et là, c’est plutôt une déception, les couleurs ont laissé place à des paysages désertiques. Même si certains passages sont sympas, c’est de longues lignes droites, plates et bien monotones que j’ai devant moi. 

Ruta 40 -  Au programme du jour : vélo d'appartement
J’ai bon espoir que ça devienne plus joli par la suite alors je roule, je persévère, je baisse la tête pour pédaler contre le vent, bref, j’aligne les kilomètres, tout droit entre la ligne à haute tension et la voie ferrée. Il n’y a d’ailleurs pas grand-chose d’autre à faire sur cette section dépeuplée. Je ne traverse qu’un ou deux villages par jour, ces quelques mots échangés avec les locaux sont souvent la seule distraction de la journée.

Village de Londres - comme partout en Argentine, tout est "endormi" entre 13h et 17h

Entre Salta et Mendoza
Les empanadas

Plus j’avance, plus les distances entre les villages s’allongent et plus c’est désertique. Le vent a décidé de m’en mettre plein la figure pour me faire profiter pleinement de ces longues lignes droites et tester mon moral. A ce petit jeu, c’est souvent lui qui gagne, quand je vois que mon compteur affiche moins de 10 km/h (sur le plat !) j’abandonne et je m’enfonce dans le désert pour bivouaquer. Peu importe qu’il soit 14h, 16h ou 18h. C’est bien là un avantage du désert: pouvoir s’arrêter quand on veut pour mettre sa tente où on veut.


Fin de journée
Les journées s’enchaînent et se ressemblent. Je me lève avec le soleil, je répare les crevaisons du jour (y a pas que des avantages aux bivouacs dans le désert). Je rejoins la route, monte sur le vélo et mets le mode « pilote automatique », les jambes tournent sans même m’en rendre compte. Une fois n’est pas coutume, je me sers de mon lecteur MP3 pour écouter de la musique en roulant, d’habitude je ne m’en sers que le soir pour les leçons d’espagnol.

Ruta 40 - aujourd'hui aussi c'est tout droit...
J’essaie de trouver une alternative. Sur ma carte, les sections rectilignes qui passent par le centre du pays n’annoncent pas mieux, et le prochain col pour rejoindre le Chili (Agua negra) n’ouvre pas avant Novembre… je continue donc sur la 40…


Village de San Blas
J’arrive au seul "petit" col de cette section de la route 40. C’est loin des grands cols traversant toute la cordillère ou je suis passé ces derniers mois. mais j’apprécie de retrouver la montagne et ses superbes paysages ! Des couleurs, des virages, des cactus, de l’eau, de la vie quoi !

Col de Cuesta Miranda - 1900 mètres d'altitude

Col de Cuesta Miranda

Col de Cuesta Miranda
Dans la descente je rencontre Jacqueline et Kalya, deux américaines en route pour Ushuaia à vélo. On ne roule que quelques kilomètres ensemble avant qu’elles ne tournent vers le parc National Talampaya, moi je continue sur la route 40.  Elles m’apprennent qu’elles ont roulé dernièrement avec mes amis kurt et Lukas et qu’ils sont dans la petite ville que j’ai passé la veille. Le monde est petit.


Col de Cuesta Miranda - rencontre avec Jacquline et Kayla

Col de Cuesta Miranda - réalisé sans trucages!

Col de Cuesta Miranda

Un matin, c’est Gérard qui vient me taper sur l’épaule. Il est Français, marié à une argentine et s’est installé à Cordoba comme professeur de ski nautique, une de  ses passions. Pendant les quelques kilomètres roulés ensemble, il m’explique le défi qu’il s’est lancé à 45 ans : parcourir les 5100 kilomètres de la route 40 du Nord au Sud, tout ça en moins de 40 jours ! Des grosses journées de vélo en perspective. Ce sera le premier à le faire en vélo de route. Bonne chance Gérard pour ce record !

 Gerard et son épouse Gabriela qui assure l'intendance - Suivez son record sur son site ou sur facebook
Je laisse partir Gérard et continue tranquillement à mon rythme, le vent semble me laisser un peu de répit et jour après jour j’approche de Mendoza.

Ruta 40 - Et entre ça y a rien?

Dans ces zones désertiques, je me fais  peur avec l’eau une fois. Encore la faute à ma carte... et aux panneaux de signalisation aussi…qui m’indiquent des villages là ou il n’y a rien. En général, par soucis de poids (heu...par fainéantise) , j’essaie de transporter juste la quantité d’eau dont j’ai besoin jusqu’au prochain village, avec une marge de « sécurité »,  sur la route 40, ça tourne souvent autour des 8 litres.


Ruta 40 - le "village" de Tucunuco - Bon ben, c'est pas ici que je vais remplir mes gourdes...

Mais quand ces villages fantômes se succèdent, je me retrouve à rouler en réserve et tombe en panne sèche au milieu de nulle part et en fin de journée (c’est mieux !) Le prochain village  où je suis sûr de trouver de l'eau est bien trop loin pour l’atteindre aujourd’hui.  Me voilà résigner à arrêter les voitures pour demander de l’eau. La circulation est faible et la moisson est bien maigre : une demi bouteille d’eau, un peu de coca, pas de quoi passer la nuit ni d’allez jusqu’au prochain village. J’abandonne vite la collecte pour passer au plan B : ces petits « sanctuaires » de fortune que je vois un peu partout en bord de route. Je pensais que c’était des sépultures, mais je me rends compte que les trois même noms revenaient souvent : San Expedito, Gauchito gil et Difuenta corea. Il y en a un tout les 20 kilomètres au moins et ils sont couverts de bouteilles d’eau (pleines !)

Un des ces sanctuaires

Je roule jusqu’au prochain, et,  sans trop savoir ce que cela signifie, je prends deux bouteilles d’eau, de quoi rouler jusqu’au prochain village. Le lendemain , j’arrive à Talacasto, une maison en tout et pour tout ! Le propriétaire m’en dit un peu plus sur ces « sanctuaires ». A la ville de San Juan, je demande aussi à plusieurs personnes. J’entends autant de versions différentes que de personnes auxquelles je demande… Il s’agit de légendes, difuenta correa serait l’histoire d’une jeune femme qui se serait échappée et serait morte de soif dans ces zones désertiques, gauchito gil aurait été pendu après avoir déserté de la guerre contre le Paraguay au 19ème siècle. Les routiers font des offrandes (eau, cigarettes, objet divers) pour leur rendre hommage.


Un autre...

Les derniers kilomètres entre San Juan et Mendoza sont plus stressants. Cette fois la circulation est assez dense et les camions m’obligent souvent à sortir de la route. Ici aussi les chauffeurs routiers préfèrent appuyer sur le klaxon pour me dire de laisser la voie libre plutôt que de freiner. Je passe les vignes qui entourent Mendoza et arrive au centre ville.  


La rue Serpenoise à Metz....heu non la rue Sarmiento à Mendoza...

Salta m’avait séduit par son coté typique et son architecture coloniale, Mendoza me plait beaucoup aussi dans un registre tout à fait différent. La ville située au pied de volcans qui culminent à plus de 6000 mètres a été sujette à un gros tremblement de terre en 1861. La ville a été reconstruite avec de larges avenues arborés, des espaces verts, des esplanades, des parcs et jardins et ressemble beaucoup à une ville française. Elle semble vraiment agréable à vivre. J'y prends quelques jours de repos et je retrouve Jaqueline et Kayla. 


Repas chez la famille qui accueille Jacqueline et Kayla - Gracias a todos
 A bientôt.